L’irrecevabilité de la preuve obtenue par le biais d’une vidéo-surveillance constante

Publié le 01/09/2021

L’employeur ne peut se prévaloir d’images issues d’une vidéo-surveillance par le biais de laquelle le salarié, qui exerçait seul en cuisine, était filmé en permanence sans avoir été complétement informé de la mise en place de ce système de surveillance.

Le salarié travaillait dans une pizzeria en qualité de cuisinier. Il réalisait ses missions, seul, dans la cuisine mise à sa disposition. Un premier avertissement pour manquement aux règles d’hygiène et de sécurité lui a été notifié, aux termes duquel l’employeur précisait « Parallèlement, nous vous informons de notre intention de mettre en place, dans les prochains jours, un système de vidéo-surveillance et un registre de contrôle et pointage de vos heures de travail. »

L’employeur justifiait la mise en place d’un tel système par la nécessité de s’assurer de l’absence de réitération par ce dernier de manquements aux règles d’hygiène et de sécurité, dans un but de sécurité des personnes et des biens.

Le salarié a finalement été licencié pour faute grave quelques mois plus tard. Ce dernier s’était volontairement lacéré son avant-bras gauche à l’aide d’un morceau de verre, en se prévalant d’un accident du travail. L’employeur avait pu constater les faits grâce à la vidéo-surveillance qui avait été installée. Toutefois, cette preuve a été considérée comme étant irrecevable par la Cour de cassation, pour deux raisons.

                D’une part, la Cour a constaté que la société n’avait pas complétement informé le salarié quant à la finalité du système de surveillance, de la personne destinataire des images et des modalités concrètes de l’exercice du droit d’accès dont disposent les salariés. Cette information n’était donc pas suffisante.

               D’autre part, la Cour a remarqué que le salarié était le seul cuisinier de la société, qu’il était donc le seul à travailler dans la cuisine, et donc le seul à faire l’objet de la vidéo-surveillance.

Or l’article L.1121-1 du Code du travail interdit à toutes personnes de restreindre les droits et libertés individuelles et collectives sauf si cette restriction est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.

La Cour de cassation a donc considéré la vidéo-surveillance permanente, ciblant un seul salarié, comme étant excessive et donc disproportionnée au but recherché par l’employeur. Cette preuve était donc inopposable au salarié et irrecevable, de sorte que l’employeur ne pouvait s’en prévaloir pour justifier le licenciement.

Texte de référence :

Loi informatique et libertés du 6 janvier 1978

RGPD entré en vigueur le 25 mai 2018

Cassation, Sociale, 23 juin 2021, n°19-13.856